La victoire sur l’excision du Dr Pierre Foldès. afrik.com, 25 janvier 2006


 
[Instructif, ce commentaire de livre. Ainsi, depuis belle lurette l’excision est devenue une violence contre les femmes... exclusivement féminine. Les hommes n’y ont aucun intérêt : au contraire, ils recherchent des non-excisées. C’est l’addition d’une tradition obscurantiste transmise de mère à fille, et d’un juteux commerce maintenu à leur profit par les exciseuses. En l’occurence, c’est un homme qui répare les terribles dégâts causés par les unes et les autres.]
 
 
Dossier Excision
 
La victoire sur l’excision du Dr Pierre Foldès

Hubert Prolongeau raconte le combat de l’urologue qui reconstruit les clitoris excisés

par Habibou Bangré

Parce qu’Hubert Prolongeau trouvait qu’un portrait de Pierre Foldes n’était pas suffisant, le journaliste et écrivain français a décidé de lui consacrer un livre : Victoire sur l’excision. Une mine d’informations où il raconte comment et pourquoi le docteur, un urologue humble et profondément humaniste, a mis au point d’une opération révolutionnaire : la reconstruction des clitoris excisés.
 
Passionnant
 
Le Docteur clitoris. C’est un surnom qui pourrait bien aller à Pierre Foldes, l’urologue français qui a mis au point la reconstruction des clitoris excisés et des petites lèvres. Une opération révolutionnaire largement médiatisée, en France et ailleurs. Résultat : des femmes arrivent des quatre coins de la planète pour bénéficier de l’opération miraculeuse qui leur permettra de se sentir entière, de s’épanouir socialement et sexuellement en tant que femme. Un parcours remarquable qu’Hubert Prolongeau retrace dans Victoire sur l’excision. Un livre dans lequel il cite des entretiens qu’il a eu avec Pierre Foldes.
 
Les menaces sont la preuve que c’est le bon combat
 
Pourquoi s’arrêter au portrait, s’est dit le journaliste et écrivain français, alors qu’il y a tant à dire sur l’intervention et le combat de Pierre Foldes. Effectivement. Ce qui a conduit ce bourreau de travail d’origine hongroise à réparer les conséquences d’une coutume aujourd’hui largement considérée comme néfaste, c’est son voyage au Burkina Faso, où il a pour la première fois pris conscience de la souffrance des femmes excisées. Il a réfléchi à comment les aider, en bon humanitaire qu’il est. Et il a réussi, en utilisant une méthode simple, qui s’apparente à la technique de rallongement de la verge. Un succès qui n’a en rien entamé l’humilité du docteur, qui raconte à Hubert Prolongeau que « couper un clitoris, c’est bousiller une femme entière  ».
 
Les femmes mutilées sont aux anges : elles peuvent enfin récupérer ce qu’on leur a « volé » à l’aide d’une lame, d’un couteau ou d’un morceau de verre. Les exciseuses, et ceux qui ont intérêt à ce que l’excision reste ce qu’elle est, menacent. Parfois de mort. Mais le jeu en vaut la chandelle. Pierre Foldes a fait de nombreuses missions humanitaires, en Afrique et ailleurs, au cours desquelles sa vie a été plusieurs fois menacée. Il vit avec ce risque, ça fait partie du métier. Mieux, il se dit que si son opération, qu’il s’est démené à rendre gratuite, suscite tant de récriminations, c’est qu’il ne s’est pas trompé de combat.
 
Témoignages poignants de victimes
 
Pour raconter l’histoire de Pierre Foldes et l’enjeu de sa découverte, l’auteur contextualise longuement (géographiquement, historiquement, religieusement, traditionnellement...) la pratique de l’excision. Il jongle avec habilité avec plusieurs genres journalistiques, comme le portrait, l’enquête ou le reportage, et essaye de rester objectif en donnant la parole aux opposants et aux supporters de l’excision. Mais il ne cache pas qu’il condamne clairement ce qui fait partie des « mutilations génitales féminines ». Pour étayer les propos développés, il relate de nombreux témoignages poignants de victimes, qui pour certaines ne se considèrent d’ailleurs pas comme tel. Le tout est enveloppé dans une écriture souple, claire et vive.
 
L’ouvrage, préfacé par l’ancien ministre français de la Santé Bernard Kouchner, permet de faire le bilan des avancées en matière de prévention. Des victoires ? Il y en a. Par exemple, des villages ont déjà officiellement abandonné l’excision, au Burkina Faso et au Sénégal notamment. Et Pierre Foldes a ouvert la voie à une nouvelle forme de lutte. Petit à petit, les mentalités s’éveillent aux risques de cet héritage qui, quand il ne tue pas, laisse souvent de graves séquelles physiques et psychologiques. Mais le chemin est encore long avant que la victoire soit totale.
 
le 25 janvier 2006

lien : http://www.afrik.com/article9370.html

[Tout le Dossier excision disponible à cette adresse est très intéressant]



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