Pauline Harmange, misandre et fière de l’être


 

Pauline Harmange, misandre et fière de l’être

Cette militante nous a rendu un grand service. Avant qu’elle ne publie son (premier) essai, la règle théorique chez les misandres était d’édicter que "la misandrie n’existe pas". On comprend pourquoi : si la misandrie existait, cela signifiait que des femmes elles aussi pouvaient être sexistes (contre les hommes), alors que selon le dogme elles ne nourrissent que de bons sentiments, et qu’en tant que victimes du sexisme elles ne font que le subir, elles ne le pratiquent pas.

Avec Pauline Harmange, en 2020, tout change : elle annonce fièrement sa misandrie, l’argumente, la justifie, et même s’en félicite. Vu ce que sont les hommes, la misandrie est pleinement justifiée, pleinement ressentie, et c’est même une libération que de la proclamer. Ceci dit, en bon idéologue, elle sait tempérer son propos : le sexisme contre les hommes existe bien, mais il est infiniment moins grave et plus légitime que le sexisme contre les femmes.

En tous cas, voilà quelqu’un qui nous donne raison : quelle que soit l’envergure qu’on lui attribue, la misandrie existe bel et bien. Et ce que nous affirmons depuis vingt ans est déormais validé par nos adversaires. Merci donc, sincèrement, à Pauline Harmange.

Son (petit) livre a beaucoup de succès. En voici un aperçu en quelques citations (Moi les hommes, je les déteste. Seuil, 2020).

 

Définition de la misandrie (p. 15) :

Je parlerai donc de misandrie comme d’un sentiment négatif à l’égard de la gent masculine dans son ensemble. Le sentiment négatif en question peut être représenté sous la forme d’un spectre allant de la simple méfiance à l’hostilité, qui se manifeste la plupart du temps par une impatience envers les hommes et un rejet de leur présence dans les cercles féminins.

 

Et des hommes (p.12) :

 

Ca ne m’empêche pas de me demander pourquoi les hommes sont ce qu’ils sont. Des êtres violents, égoïstes, paresseux et lâches. Et pourquoi on serait obligées, en tant que femmes, d’accepter avec grâce ces défauts – que dis-je, ces tares – alors même que les hommes nous frappent, nous violentet nous tuent.

 

Les organisations masculines (p. 76)

 

Les masculinités toxiques qui nous oppressent sont forgées dans les cercles masculins fermés. Depuis les clubs de foot jusqu’aux fraternités américaines (et leurs pendants français, les organisations d’étudiants en médecine, par exemple) en passant par la ligue du LOL et la majorité des instances dirigeantes à travers le monde, c’est quand on laisse les hommes entre eux qu’ils développent leurs pires travers. A les entendre, ils ne font que passer du bon temps, ils s’amusent et s’entraident. En réalité, ils exacerbent leurs virilités pour étendre leur pouvoir et consolider leur réseau, le tout dans un grand combat de coqs. Ou plutôt dans une grande corrida, puisqu’en fait, ce n’est jamais eux qu’ils blessent dans le processus. Si leur carte de membre du boys’club doit se faire au prix du mépris des femmes et des minorités, pourquoi se priver ?

 

Légitimation de la misandrie (p 36)

 

Dans l’imaginaire collectif, misandrie et misogynie sont deux faces de la même médaille, celle du sexisme. C’est la faute à l’étymologie, j’imagine : construits sur les mêmes racines, ces deux mots doivent donc recouvrir exactement les mêmes principes, n’est-ce-pas ? Eh bien non, car la vie est une grande farceuse.(…) On ne peut pas comparer misandrie et misogynie, tout simplement parce que la première n’existe qu’en réaction à la seconde.

 

Célébration de la misandrie (p. 14)

 

Je vois dans la misandrie une porte de sortie. Une manière d’exister en dehors du passage clouté, une manière de dire non à chaque respiration. Détester les hommes, en tant que groupe social et souvent en tant qu’individu aussi, m’apporte beaucoup de joie – et pas seulement parce que je suis une vieille sorcière folle à chats.

Si on devenait toutes misandres, on pourrait former une grande et belle sarabande. On se rendrait compte (et ce serait peut-être un peu douloureux au début) qu’on n’a vraiment pas besoin des hommes. On pourrait, je crois libérer un pouvoir insoupçonné : celui, en planant très loin au-dessus du regard des hommes et des exigences masculines, de nous révéler à nous-mêmes.

 



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