Andrea Dworkin, l’anti-"mâle" (1946-2005)


  

Andrea Dworkin (1946-2005)

 

Ce qu’on appelle

"le physique de l’emploi"...

 

 

- américaine née dans le New-Jersey 

- a écrit treize ouvrages d’essai, de fiction et de poésie.

- idéologue misandre camouflée en féministe, spécialisée dans les problèmes de la prostitution et de la pornographie, qu’elle a toutes deux pratiquées. Dans les années 80, avec Catherine A. Mc Kinnon, autre idéologue bien connue, a fait adopter par plusieurs conseils municipaux une résolution définissant la pornographie comme une discrimination, laquelle fut annulée en 1986 par la Cour suprême des Etats-Unis.

- en 1974, rencontre John Stoltenberg, qu’elle épousera en 1998, formant un couple bien assorti, puisqu’il est lui aussi un idéologue misandre, indépassable auteur de Refuser d’être un homme (1989)

- très peu de textes traduits en français :

* La pornographie et le désespoir. Dans : Laura Lederer. L’envers de la nuit. Montréal, Les éditions du remue-ménage, 1982. Environ quatre pages dactylographiées : http://sisyphe.org/article.php3?id_article=2615

* Pouvoir et violence sexiste. Editions Sisyphe, 2007. Recueil de cinq textes dont quatre conférences, de 1978 à 1995. [Le choix des misandres québécois de Sisyphe de traduire et publier ces textes explicitement sexistes laisse songeur : cela manifeste soit une bonne dose d’inconscience, soit une volonté d’afficher ouvertement leur sexisme, sans prendre aucune précaution particulière.]

* Je veux une trêve de vingt-quatre heures durant laquelle il n’y aura pas de viol. 1993. Discours prononcé à St Paul, Minnesota, devant des hommes proféministes : https://tradfem.wordpress.com/2014/05/16/je-veux-une-treve-de-vingt-quatre-heures-durant-laquelle-il-ny-aura-pas-de-viol/

 

***********
 

Comme ses admirateurs traitent de faussaire quiconque s’essaie à la commenter à partir de ses textes en anglais, nous ne le faisons qu’à partir des deux références précitées, traduites et publiées toutes deux chez des éditeurs qui la révèrent : même s’ils sont peu nombreux, ces textes étalés sur dix-sept ans reprennent invariablement les mêmes idées et permettent de se faire une idée tout à fait adéquate de sa pensée.
 
Chez Dworkin, toute parole s’appuie sur des procédés d’expression simples et systématiques, inlassablement réutilisés. Quand elle exprime une idée, elle dit « nous », ou « nous, les femmes  ». Quand elle parle des actes ou des idées des hommes (ou du moins ceux qu’elle leur prête), elle dit alternativement «  les hommes », «  les mâles  », «  ils », « l’homme », «  le mâle  », «  il », « on  ». Quand elle parle de l’histoire, du monde, elle dit « les sociétés ».

Dire «  nous » (et non « je ») lui permet de poser l’existence d’une pensée commune à toutes les femmes de toutes les époques, une pensée consensuelle dont elle porterait la parole. Dire « les hommes  » (et non « des hommes », ou « certains hommes », ou « beaucoup d’hommes ») lui permet symétriquement de poser une pensée commune et consensuelle de tous les hommes de toutes les époques, qui s’opposerait en tout à celle des femmes, et que sa sagacité aurait démasquée. Dire «  les sociétés » (et non « la société X ou Y ») revient à poser une invariabilité de l’organisation humaine : une « domination masculine » éternelle, s’exerçant à l’encontre des femmes dépossédées de tout pouvoir.

Autre procédé : l’emploi récurrent de « mâle » comme adjectif à la place de « masculin », qui s’ajoute à l’emploi de « mâle » comme substantif. Ainsi dans La pornographie, « mâle  » est employé à dix-huit reprises. Exemples : « vengeance mâle », « contrôle mâle  », « intellectuels mâles  », etc. Il s’agit évidemment d’imprimer l’idée selon laquelle les hommes relèvent de l’animalité (avec ce que cela connote : absence de sentiment, de contrôle, dangerosité, etc.) et non de l’humanité.

Nous, les femmes de toujours, contre eux, les hommes, tous les hommes de toujours, ces animaux

Un tel discours est forcément sous-tendu par une conception essentialiste : les hommes sont ce qu’ils sont par nature – les femmes aussi, d’ailleurs. Même si elle évite soigneusement de le dire explicitement, même si elle le nie, mais elle se trahit souvent. A leur tour, ses admirateurs (cf Martin Dufresne dans la préface du Pouvoir) s’échinent à démontrer qu’elle n’est pas essentialiste. Ce que nous citons d’elle ici suffit à les démentir.

Dworkin est animée par une haine sexiste à l’état brut, explicite, absolue et outrancière, à tel point qu’il est à peine besoin de classer ou de commenter les citations comme celles qui suivent.

 

***********

 

Sur l’identité masculine = haine et domination des femmes (extraits de Pouvoir) :

p. 31 Mais il y a une condition préalable à la joie dans le code masculin, et cette condition, c’est que les femmes soient à leur place, une place subalterne. Vous ne pouvez pas avoir beaucoup de plaisir en tant qu’homme dans le monde si des femmes sont hors de contrôle quelque part dans votre champ de perception.

p. 46-47 Le premier axiome idéologique de la suprématie masculine est que les hommes possèdent ce soi et que les femmes, par définition, en sont nécessairement privées. (…) Le soi immuable du mâle se résume à un parasitisme exercé sans le moindre embarras.

p. 49 Le second axiome de la suprématie masculine, c’est que les hommes possèdent plus de force physique que les femmes et, pour cette raison, les dominent. (…) Les hommes choisissent comme partenaires des femmes physiquement faibles (sauf si le travail de force fait partie du rôle de femme) et, dans l’éducation des femmes, la force physique est systématiquement minée et sabotée.

p. 51 La terreur émane de l’homme, illumine sa nature essentielle et son but premier.

p. 56 Le mâle ne se contente pas de nommer les femmes mauvaises : il extermine neuf millions de femmes comme sorcières parce qu’il a nommé les femmes mauvaises.
[rappelons que l’estimation actuelle est de 50 000 exécuté-e-s, dont 20% d’hommes ; cf Guy Bechtel. La sorcière et l’Occident – on appréciera le souci d’exactitude scientifique de Dworkin !] Il ne fait pas que nommer les femmes faibles : il mutile le corps féminin, l’attache de façon à restreindre ses mouvements, s’en sert comme jouet ou ornement, le garde en cage ou atrophié parce qu’il a nommé les femmes faibles.

p. 112 Chaque fois que nous regardons la condition des femmes dans un pays donné, il nous faut regarder les façons dont la domination masculine s’organise. Aux Etats-Unis, par exemple, nous voyons croître une population de tueurs en série. Ils forment déjà une sous-culture dans mon pays ; il ne s’agit plus de déviants solitaires. Les forces de l’ordre, aux statistiques toujours conservatrices, évaluent que près de 400 tueurs en série sont actifs chaque jour aux Etats-Unis.

 

 **********

 

Sur la sexualité masculine = violence (extraits de La pornographie) :

L’aspect le plus important de la pornographie, c’est que les valeurs qui y sont charriées sont les valeurs partagées par tous les hommes.

On peut tout savoir et pourtant être incapable d’accepter le fait que la sexualité et le meurtre soient à ce point amalgamées dans la conscience mâle, que la première soit impossible et impensable sans la possibilité imminente de l’autre. On peut tout savoir et pourtant, au fond de soi, refuser encore d’accepter que l’anéantissement des femmes soit pour les hommes la source de leur pensée et de leur identification.

Pour les hommes, en fait, le processus du meurtre – les coups et le viol sont des étapes de ce processus – est l’acte sexuel fondamental en réalité et/où en imagination.

le plaisir érotique des hommes trouve son origine et son fondement dans la destruction sauvage des femmes.

La sexualité masculine est une guerre menée contre les femmes. A tel point qu’elle demande aux hommes une "trêve de vingt-quatre heures" (Je veux une trêve).

Même dans les guerres, il y a des jours de trêve. Allez-y et organisez une trêve. Faites obstacle à votre camp pour un jour. Je veux une trêve de vingt-quatre heures durant laquelle il n’y aura pas de viol.

Sur sa conception de la sexualité, une polémique fait rage depuis longtemps. Certains des détracteurs de Dworkin, s’appuyant sur des citations comme « La violation est un synonyme pour le coït  » ou « Le discours de la vérité masculine appelle cette pénétration une violation » lui reprochaient d’assimiler toute pénétration à un viol. Dworkin s’est élevé avec vigueur contre cette interprétation, selon nous de bonne foi. En fait, lorsqu‘elle procède à ce genre d’affirmation, elle prétend se placer du point de vue des hommes : pour les hommes, la pénétration est un viol, c’est-à-dire que même dans une relation consentante, ils trouvent leur plaisir dans la sensation de commettre un viol ; c’est-à-dire aussi que pour eux il n’y a pas de sexualité, de plaisir ou d’amour qui ne soit associé à la sensation de contraindre les femmes. Quelle que soit celle qu’on retienne, les deux interprétations sont bien sûr tout aussi sexistes.

 

**********

 

Enfin, si Dworkin est très attentive à conserver une ligne victimiste, elle laisse parfois affleurer la violence et l’envie de tuer qui l’habitent :
 .
Pouvoir, p. 100 : Mes chéries, nous pourrions sortir les mitraillettes ce soir. Juste ? Nous nous brisons le coeur avec ces questions. Est-ce juste ? Ne respectez pas leurs lois. Non. Ne respectez pas leurs lois. Il est temps que les femmes créent leurs lois.

 

 Patrick Guillot (2007)



Imprimer

Menu

Menu :