Mon fils, ma bataille. Daniel Balavoine. 1980
Mon fils, ma bataille
Paroles et musique : Daniel Balavoine, 1980, "Un autre monde", Editions Barclays-Morris
Reprises : Roch Voisine & Francis Cabrel & Julien Clerc dans l’album "Enfoirés en 2000"
Reprises : Roch Voisine & Francis Cabrel & Julien Clerc dans l’album "Enfoirés en 2000"
La chanson lui a été inspirée par le divorce de son guitariste Colin Swinburne, et par le film Kramer contre Kramer, sorti en février 1980. Sur cette genèse : http://www.telestar.fr/2016/photos/daniel-balavoine-pour-qui-a-t-il-ecrit-son-tube-mon-fils-ma-bataille-photos-187230
Ça fait longtemps que t’es partie
Maintenant
Je t’écoute démonter ma vie
En pleurant
Si j’avais su qu’un matin
Je serai là, sali, jugé, sur un banc
Par l’ombre d’un corps
Que j’ai serré si souvent
Pour un enfantOh
Tu leur dis que mon métier
C’est du vent
Qu’on ne sait pas ce que je serai
Dans un an
S’ils savaient que pour toi
Avant de tous les chanteurs j’étais le plus grand
Et que c’est pour ça
Que tu voulais un enfant
Devenu grandOh
Les juges et les lois
Ça m’fait pas peur
C’est mon fils ma bataille
Fallait pas qu’elle s’en aille
Oh
Je vais tout casser
Si vous touchez
Au fruit de mes entrailles
Fallait pas qu’elle s’en ailleBien sûr c’est elle qui l’a porté
Et pourtant
C’est moi qui lui construis sa vie lentement
Tout ce qu’elle peut dire sur moi
N’est rien à côté du sourire qu’il me tend
L’absence a ses torts
Que rien ne défend
C’est mon enfantOh
Les juges et les lois
Ça m’fait pas peur
C’est mon fils ma bataille
Fallait pas qu’elle s’en aille
OhJe vais tout casser
Si vous touchez
Au fruit de mes entrailles
Fallait pas qu’elle s’en aille
2x
* * * * * * * * * * * * * * * * * * *
Dans son livre Le suicide français (Albin Michel, 2014), Eric Zemmour a consacré au texte de la chanson une analyse assez critique (article daté du 1er novembre 1980). Nous la reproduisons partiellement, avant d’en proposer notre commentaire (c’est nous qui colorons en gras) :
(...)Balavoine pousse aussi jusqu’au bout cette inversion des rôles et des sexes qui obsède notre temps, dans la mode vestimentaire comme dans la vie professionnelle et sentimentale. Elle est partie, il est resté. Elle est dehors, et lui dedans. Elle bourlingue, il materne. Elle attaque, il défend. Elle a quitté son fils sur un coup de tête ; "c’est moi qui construis sa vie lentement". Elle est l’impulsion, il est la lente édification. Elle l’agresse, l’invective, l’insulte, le salit ; il reçoit tout passivement :Tout ce qu’elle peut dire sur moiN’est rien à côté du sourire qu’il me tendEt le refrain ose l’inversion ultime :Je vais tout casserSi vous touchezAu fruit de mes entraillesFallait pas qu’elle s’en ailleElle est l’homme, il est la femme. On avait déjà remarqué que le visage de Delpech à l’époque des "Divorcés" s’était arrondi, adouci, alangui. Avec Balavoine, la féminisation progresse et gagne la voix, descend jusqu’aux entrailles. "Mon fils, ma bataille" est à la chanson ce que le film de Jacques Demy en 1973, "L’evénement le plus important depuis que l’homme a marché sur la Lune", fut au cinéma : Balavoine, après Marcello Mastroianni, a lui aussi enfanté ! (...)L’homme est devenu une mère comme les autres. (...)
On constate là la convergence d’un théoricien conservateur, imprégné d’idéologie bourgeoise, avec l’idéologie misandre, au moins sur la conception des rôles parentaux : le vrai parent est la mère, le père est un parent accessoire. Il n’y a aucune "inversion des rôles" : Balavoine prétend élever son fils, que la mère a dans un premier temps abandonné : il est totalement dans son rôle, et même dans son devoir, de père. Il ne "materne" pas, il paterne. L’enfant est bien le "fruit de ses entrailles", à moins de soutenir (point de vue misandre) qu’il n’a joué aucun rôle dans la conception. Il est faux de dire qu’il "reçoit tout passivement" : au contraire, il se bat, contre les manigances de son ex, contre la "Justice" sexiste, contre l’idéologie anti-pères, et il s’agit bien d’une "bataille".
Les (vraies) mères et les (vrais) pères ont certes des manières différentes d’aimer et d’éduquer, et cette différence doit être respectée. Cela n’empêche pas que leurs investissements repectifs soient tout aussi importants.
Imprimer