Le tribunal annule un mariage "arrangé" entre deux cousins marocains. Rue Frontenac, 16 novembre 2009


 

[Soit on nous raconte des histoires sur les mariages forcés comme on nous en raconte sur d’autres choses, soit celui qui est décrit ci-après est complètement atypique. En effet :

- c’est l’homme qui est contraint au mariage, la jeune femme semblant y être disposée en échange de l’intérêt matériel qu’elle va y trouver ;

- sa famile exerce sur l’homme une pression extrême, et ce bien qu’il soit largement majeur et émigré dans un état occidental ;

- ce sont les mères qui décident de l’union et la négocient (on nous décrit pourtant le Maroc comme une société, patriarcale absolue) ;

- après l’union la mariée n’est nullement soumise : elle fait ce qu’elle veut, à commencer par refuser la vie commune]

 

Le tribunal annule un mariage "arrangé" entre deux cousins marocains

Un tribunal montréalais vient d’annuler un mariage arrangé par deux branches d’une riche famille marocaine dans le cadre d’un "marchandage" entre les parents pour unir un homme et sa cousine, parce que la mariée n’a pas démontré d’intérêt à faire vie commune ni à participer aux tâches ménagères une fois obtenus ses papiers d’immigration.

C’est l’homme, un Montréalais d’origine marocaine âgé de 37 ans, qui a entrepris les procédures judiciaires pour faire annuler l’union, parce qu’il était malheureux dans ce mariage décidé par ses parents.

"C’est très important de souligner que ce mariage n’a pas été annulé uniquement parce qu’il avait été arrangé par les parents, mais plutôt parce qu’il y avait un manque de volonté de la part de la femme de faire vie commune", insiste Me Ahmed Jazouli, l’avocat du marié.

"Elle ne voulait pas s’engager dans les tâches ménagères, elle avait caché à son mari qu’elle avait de l’argent et elle lui a dit carrément qu’elle avait eu ses papiers d’immigration et qu’elle ne voulait plus rien savoir de lui", raconte le juriste, en entrevue avec Rue Frontenac.

L’homme, qui habite au Québec depuis 2001, vivait d’intenses pressions de la part de sa famille pour se marier.

"C’est incroyable, mais c’est vrai, même à notre époque, même si la personne a plus de 30 ans, elle peut être quasiment sous le joug de sa famille. Pour faire partie de la famille et ne pas avoir la malédiction sur lui, mon client a accepté de se marier", explique Me Jazouli.

Cohabitation brève

La mère de l’homme, âgée de 75 ans, partage son temps entre le Maroc et le Québec. Devant le tribunal, elle est venue raconter comment elle avait négocié le mariage de son fils avec sa jeune cousine de 19 ans sans que les deux futurs mariés soient impliqués dans le processus.

"La description des échanges entre les deux mères équivaut à un véritable marchandage", a noté la juge Gaudreau.

Le mariage a été célébré en 2006 et le demandeur a parrainé peu après sa nouvelle épouse afin qu’elle puisse immigrer au Canada.

Les deux époux cohabitent à peine pendant un mois à Montréal avant que les choses dégénèrent. L’homme part donc vivre chez sa sœur, dont l’appartement est situé à 200 mètres du domicile conjugal, afin de laisser sa femme réfléchir.

La juge note que "les deux parties n’ont pas la même conception de la vie commune". L’homme a témoigné que lorsqu’il demandait à son épouse de l’aider dans les tâches ménagères, elle répondait : "Je ne suis pas ta bonne." Il l’aurait aussi surprise avec un autre homme dans l’appartement.

Selon lui, les agissements de sa cousine constituaient des manœuvres pour obtenir sa résidence permanente au Canada.

Considérant que la preuve établissait que la femme n’avait pas l’intention de faire vie commune, la juge Marie Gaudreau, de la Cour supérieure du Québec, a accordé la requête du mari en annulation de mariage le 30 octobre.

"C’était important pour nous, cette demande d’annulation en notre faveur plutôt qu’une simple demande de divorce, parce que l’épouse est entrée au Canada grâce au mariage, et mon client était responsable d’elle devant immigration", explique Me Jazouli.

L’avocate de la femme n’avait pas encore pris connaissance du jugement lorsque jointe par Rue Frontenac et n’était donc pas en mesure de le commenter.

Vincent Larouche

Rue Frontenac, 16 novembre 2009

ruefrontenac.com/nouvelles-generales/justice/13823-tribunal-cour-superieure-mariage-annulation-immigration-maroc



Imprimer

Menu

Menu :